Juste avant Noël, l’année dernière, je vivais l’une des périodes les plus tristes de ma vie. Dans un laps de 48 heures, j’ai perdu, subitement, deux membres de ma famille immédiate. Le premier, un fils attendu pour quelques mois plus tard, et le deuxième, ma mère, qui a subi une crise cardiaque à la suite d’une grippe intense.
De tels moments nous laissent sans vocabulaire. On se trouve dans un tourbillon d’émotion et d’activité : les arrangements funéraires et les réservations de vols sont entrecoupés par des appels de la famille, des visites d’amis, et des heures prostrées, à arroser le bois franc de larmes. Notre cerveau ne fonctionne plus comme d’habitude; j’ai compris pour la première fois de ma vie ce que signifient « des soupirs inexprimables».
Mais ce qui a donné expression à mon cœur est une habitude que j’ai adoptée il y a quelques années. Depuis lors, j’ai résolu que mes premiers et derniers moments de la journée soient donnés à la prière, tirée des psaumes – le livre de prières de la Bible. Je n’avais pas pensé, tout particulièrement, à la prière ce soir-là; c’est tout simplement ce que je fais avant d’éteindre la lumière. Établir une discipline prend de l’effort, mais à la longue, ça devient automatique. Alors, assis sur mon lit, j’ai pris ma Bible et j’ai prié le prochain psaume, 126 :
Quand l’Éternel a changé le sort de Sion,
nous étions comme dans un rêve.
Alors nous ne cessions de rire
et de pousser des cris de joie.
Alors on disait chez les autres peuples :
« Oh, l’Éternel a fait pour eux de grandes choses ! »
Oui, l’Éternel a fait pour nous
de grandes choses :
nous sommes dans la joie.Viens changer notre sort, ô, Eternel,
comme quand l’eau coule à nouveau dans les lits des rivières du Néguev.Qui sème dans les larmes
moissonnera avec des cris de joie !
Qui s’en va en pleurant alors qu’il porte sa semence
reviendra en poussant des cris de joie, alors qu’il portera ses gerbes.
Bien évidemment, le premier mouvement du psaume ne me rejoignait pas du tout : le psalmiste parle d’une vie de rêve, une vie remplie de joie, de rires, de victoire. Mais au deuxième mouvement, nous constatons que ces moments de rêve sont disparus comme un rêve qui s’enfuit au lever du jour. Ils ne sont qu’un souvenir, difficile à saisir, menaçant de partir pour toujours malgré nos meilleurs efforts pour les garder en tête.
Mais le psalmiste ne regarde pas seulement vers le passé; il a en même temps un œil sur l’avenir. Il est certain que Dieu changera ses larmes en cris de joie. Comment le fera-t-il? C’est un mystère; celui qui prie ne le sait pas plus que le fermier qui attend de voir sa semence germer. Mais les deux restent sûrs que cela arrivera.
Dans les jours et mois qui ont suivi, je suis revenu encore et encore à ce psaume. Il m’a donné le vocabulaire pour exprimer la perte que je vivais et il m’a rappelé, chaque jour, du fait que même si je ne pouvais pas le comprendre, Dieu demeure bon à travers tout.
Nous avons souvent l’impression que nous devons innover dans la prière – que nos paroles ne sont authentiques que si elles n’ont jamais été exprimées par quelqu’un d’autre. Mais il me semble que ceux qui excellent dans la prière, tout comme ceux qui excellent dans la vie chrétienne, sont ceux qui se rendent compte qu’ils ne peuvent pas le faire pour eux-mêmes. Si, comme plusieurs l’ont déjà dit, les Psaumes sont « le livre de prières de Jésus », de quelle meilleure source pouvons-nous puiser afin d’augmenter notre vocabulaire de prière? Comment être mieux équipé pour affronter toute situation de la vie, qu’en apprenant du Maître, et en priant ces mêmes paroles avec lui?
La pratique
Il existe une multitude de manières de prier les psaumes, mais je vous en propose trois :
- Prier les psaumes peut être aussi simple que de lire un psaume mot par mot, comme une prière, chaque jour.
- Sinon, tu peux prendre un verset ou une phrase à la fois, l’exprimer dans tes propres mots et l’appliquer à ce que tu vis en ce moment. Par contre, cette approche ne sera pas toujours possible. Mais nous pouvons prier ces textes plus difficiles par la foi, avec et pour le corps universel du Christ. Prions-les au nom de ceux qui vivent des souffrances ou des joies que nous ne connaissons pas en ce moment. Ou bien, prions en nous souvenant des souffrances, des joies, et de la victoire de Jésus lui-même.
- Martin Luther a proposé à un ami une « manière simple de prier » qui s’apprête bien aux psaumes : prendre chaque idée (verset, phrase, paragraphe) d’un texte biblique d’abord comme une instruction (quelque chose à apprendre); ensuite comme une action de grâce (une prière de reconnaissance); troisièmement comme une confession (une occasion de reconnaître nos fautes ou bien de reconnaître la bonté de Dieu); et finalement comme une supplication – quelque chose à demander à Dieu.
Image de Dustin Bryson sur Unsplash

Brad Stewart
Brad Stewart est équipier de Pouvoir de Changer - Étudiants dans la Capitale nationale où il dirige les initiatives du groupe avec son épouse Cassandra. Brad étudie la théologie à l’Université Laval où il explore entre autres la contextualisation et la nature de la communauté chrétienne. Il est aussi luthier dans ses temps libres.
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